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[INTERVIEW] Patrick Rebeaud, réalisateur de L’AFFAIRE LEPRINCE, le cold case de l’histoire du cinéma

Last updated on 3 mai 2023

L’Histoire est écrite par les vainqueurs, c’est aussi bien vrai dans nos anciens livres d’école que dans nos salles de cinéma. C’est pour cela que certaines personnes se donnent pour mission d’ouvrir nos yeux sur d’autres possibilités, comme Patrick Rebeaud…

Connaissez vous l’Histoire du cinéma, la vraie ? Aujourd’hui, le débat fait rage quant à la paternité des tous premiers appareils de capture et de projection des images. Qui de Thomas Edison ou des frères Lumières est à l’origine de la première caméra ? Et si je vous disais ni l’un ni les autres, mais plutôt un certain Louis Augustin Leprince ?

Vous me direz alors : mais dans ce cas, pourquoi l’aurait-on oublié ? En attendant de pouvoir un jour changer le monde, j’ai pu m’entretenir avec Patrick Rebeaud, réalisateur, qui s’est donné pour mission de réhabiliter Louis Leprince dans l’histoire officielle du cinéma à travers un film documentaire : L’AFFAIRE LEPRINCE : le cold case de l’histoire du cinéma.

Patrick Rebeaud, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

J’ai fait mes études dans une école d’art, puis à l’IDHEC (actuelle FEMIS (École nationale supérieure des métiers de l’image et du son, ndlr)). J’ai réalisé des films d’animation dans diverses techniques, travaillé sur des magazines (notamment pour ARTE), et réalisé des documentaires. Actuellement, j’écris des projets de fictions et de documentaires.

Aujourd’hui, vous nous présentez un nouveau film documentaire au sujet de Louis Aimé Augustin Leprince, un personnage important de l’histoire du cinéma mais pourtant inconnu de tous. Pouvez-vous nous le présenter, et nous expliquer en quoi son travail fut d’une importance capitale ?

Le français Louis Aimé Augustin Leprince a réussi à capter des scènes animées bien avant Edison et les frères Lumière. Il a inventé des caméras avec lesquelles il a réalisé des prises de vues dans la rue ; d’abord à Paris, puis à Leeds en Angleterre. Il a aussi filmé sa famille marchant joyeusement dans le jardin et jouant du bandonéon. Leprince est un vrai pionnier du cinéma. Il est étonnant que l’on parle si peu de lui. Quatre de ses saynètes existent encore. Mais il en a probablement fait beaucoup plus, car il en reste les projets écrits, ainsi que des caméras.

Contrairement à David Wilkinson au travers de son « The First Film », vous avez choisi de vous intéresser à la mort de Louis Aimé Augustin Leprince et avez nommé votre film « L’AFFAIRE LEPRINCE, le cold case de l’histoire du cinéma ». En quoi la disparition de Leprince est-elle si mystérieuse et a autant déchaîné les passions à son époque ?

Les documentaires anglophones qui avaient été tournés auparavant racontaient ce que l’on sait de la vie d’Augustin. C’est à dire plutôt sa période heureuse en Angleterre. J’ai fait le contre-champ : ses époques mystérieuses en France. Sa disparition est incroyable. Elle s’est produite à l’instant précis où Leprince allait faire connaître son travail.

En Grande-Bretagne, Louis Leprince est bel et bien reconnu comme l’un des pères du cinéma. Son tournage de trois secondes à Leeds se déroule en 1888, soit trois ans avant Edison et sept ans avant les frères Lumière.

De toutes les théories autour de sa disparition, je dois dire que celle impliquant Thomas Edison est certainement la plus séduisante pour les adeptes du complot, mais ce n’est pas la seule. Comment avez vous réalisé votre enquête pour faire le tri au milieu de toutes les suppositions de l’époque ?

Mon documentaire est un polar. Je pars à la recherche de Leprince. Je vais sur les lieux. Je refais le parcours complet du jour de sa disparition. Les précédents chercheurs ont accompli un travail important de fouilles en archives.

Pour ma part, j’ai plutôt agi comme un enquêteur.C’était passionnant. J’ai pu franchir le seuil de l’hôtel particulier de son frère, dernier lieu que Leprince a fréquenté le jour de sa disparition.

Avec Jacques Pfend, cinéphile qui s’intéresse à Leprince depuis des années, nous avons été les premiers « fous de cinéma » (c’est son expression) à entrer dans la maison natale d’Augustin. Cela étant, j’ai aussi beaucoup fouillé dans de vieux documents !

Une scène au jardin de Roundhay 1888, Louis Le Prince

En parallèle de votre film, vous avez lancé une pétition pour réhabiliter Leprince et lui réattribuer la paternité de son travail. L’usurpation l’a-t-elle donc effacé de l’histoire officielle du cinéma ?

En fait, l’histoire du cinéma, c’est très compliqué. On nous a tous appris à l’école qu’en 1895, deux frères en auraient eu soudainement l’idée lumineuse. Ça ne s’est pas du tout déroulé comme ça. C’est un processus long. L’aspect « chambre noire » existe depuis des siècles. La découverte de la décomposition du mouvement en image par image s’étire sur une bonne partie du XIXème. Dans cette chronologie, Leprince est le premier à vouloir inventer le spectacle cinématographique tel que nous le connaissons aujourd’hui. Il est le premier à sortir dans la rue avec un appareil de prises de vues et à réussir à y capter les mouvements de la vie quotidienne. Une chose, notamment, est très intéressante : son tout premier film. Il est complètement raté. Cette trace de ses tâtonnements – en plus d’être émouvante – tend à prouver qu’il est le défricheur d’une technique et d’un art en devenir. Les scènes qu’il a enregistrées par la suite sont beaucoup plus réussies.

La culture populaire s’est elle aussi réapproprié l’Histoire du Cinéma, participant sans le vouloir à la diffusion d’une pensée unique.

Après Alice Guy (à l’origine du tout premier film de fiction et dont le travail a été spolié au profit de ses collègues masculins), peut-on espérer voir un jour le nom de Louis Aimé Augustin Leprince revenir sur le devant de la scène ?

Je l’espère. Ce serait une sorte de victoire du monde de l’art (Leprince était peintre) sur celui des industriels Edison et Lumière. 

La caméra mise au point par Leprince en 1887

« En 1887, le français Louis Aimé Augustin Leprince (Augustin pour les intimes) crée une caméra. Il en fera d’autres jusqu’en 1890, année de sa disparition. Avec ses appareils, il tourne des séquences animées. Quatre d’entre elles nous sont parvenues.

Edison, lui, réalisera ses premiers films trois ans plus tard, et les frères Lumière… sept ans après !

Augustin Leprince est donc un pionnier du cinéma. Pourtant… lorsque j’ai tourné mon documentaire « L’affaire Leprince, le cold case de l’histoire du cinéma », j’ai eu une surprise : contrairement à l’Angleterre (où Leprince a habité et où il est reconnu ), les lieux où il a grandi, inventé ou travaillé en France, ne sont pas identifiés pour les passants. Pas la moindre plaque. Aucun panneau. Les villes de Paris, Dijon, Metz, où Leprince a vécu des moments très importants pour sa vie personnelle ou pour l’histoire du cinéma, n’ont donné son nom à aucune place, rue, ruelle, impasse !

Cela ne vient pas d’une mauvaise volonté de la part des personnes décidant de ces choses-là. C’est plus simple : Le français Louis Aimé Augustin Leprince est méconnu en France.

Proposons de lui rendre justice en demandant que son nom soit mis en valeur sur la voie publique, de sorte qu’il soit connu du plus grand nombre. Cela ne nuira sûrement pas au souvenir d’autres pionniers qui ont aussi leurs mérites, mais qui partageront ainsi un peu de lumière avec  cet artiste chercheur qui a joué un rôle dans l’avènement de cet art que nous aimons tous : le Cinéma ! »

Signez la pétition de Patrick Rebeaud !

Pour plus d’informations sur Patrick Rebeaud et Louis Aimé Augustin Leprince :

Relu par Margot Dupont

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One Comment

  1. […] Ce n’est cependant pas une surprise puisque pour les Babysitting et Alibi.com, c’était pareil. Aucune nouveauté de ce côté-là. Cependant, ce n’est pas pour ça que l’on va voir les réalisations de Philippe Lacheau. On y va pour son monde absurde, le comique de situation, et ses personnages hauts en couleur qui font du bien au 7ème art français. […]

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