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Panda est un·e artiste et militant·e, souffrant du syndrome d’Ehlers-Danlos. Iel a choisi de s’engager pour lutter pour la reconnaissance des droits des personnes transgenres. Et sensibiliser sur le handicap, et plus particulièrement, le handicap invisible. Sa première BD, Les galères d’un Panda, raconte son quotidien.

Ses bandes-dessinées commencent à avoir un certain succès sur le net ! Et pour cause, Panda est engagé·e. Passionné·e d’Art et de Pop culture, Panda saura vous embarquer dans son univers coloré. Entretien avec l’auteur·e des galères d’un Panda.

1) Qui se cache derrière Panda ?

Panda, jeune aux cheveux teints en rouge, tee-shirt arc-en-ciel, portant un sac avec une bouteille d'oxygène. En arrière-plan, un fond bleu et des papiers administratifs volants, incarnant l'enfer sur terre qu'est la MDPH et les autres joyeusetés.
Panda est au milieu de papiers administratifs. Iel porte un pantalon marron, un tee-shirt arc-en-ciel. Ses courts cheveux sont rouges. Iel porte également un sac noir dont la anse se termine par un panda. Le sac contient une bouteille d’oxygène. Le fond de cette image est bleu ciel. Il s’agit de la couverture de sa première BD publiée : Les galères d’un panda. Source : Panda, Les Galère d’un panda, collection personnelle, n-c


Il se cache Nel, artiste de bientôt 20 ans, non binaire, pansexuel, polyamoureux·e, handi, SEDiste, neuroatypique. Il s’y cache un·e militant·e qui a la rage d’évoluer dans ce monde, un·e artiste qui se sert de ses pinceaux pour s’exprimer, un·e écrivain·e qui manie l’art des mots pour y faire passer des idées.

Je suis une personne comme toute autre, avec mes failles, mes faiblesses, mon vécu, mes souffrances, mes forces, mon caractère et mes envies, j’apprends juste à les exploiter pour aider d’autres personnes, pour transmettre du courage, de la hargne et aussi du toudou. Je suis une personne qui ne supporte pas de rester les bras croisés quand je vois une injustice. C’est parfois un peu dur de combiner ça avec la fatigue chronique, même si la plupart du temps c’est cette rage qui me fait avancer.

Je milite pour la reconnaissance des handicaps invisibles, des personnes transgenres, pour les personnes en situation de handicap et transgenres, pour les victimes de sexisme et de misogynie. Je suis probablement un gros cliché de féministe intersectionnel radical, et ça me va. Maintenant, aux gens de sortir de leur bulle pour venir lire toutes les choses intéressantes que je dis et tous les débats que je soulève !


2) Panda, tu es atteint·e du syndrome d’Ehlers-Danlos, peux-tu nous dire de quoi il s’agit et comment cette maladie impacte ton quotidien ?


Le Syndrome d’Ehlers-Danlos (aussi appelé SED) est une maladie du collagène. Le collagène, c’est « la colle du corps », c’est un truc que tu retrouve dans tout ton corps : articulations, muscles, organes, peau, cheveux… C’est ce qui te maintient 80% du corps humain. Les personnes atteintes du syndrome d’Ehlers-Danlos manquent de collagène et le peu qui leur reste est en mauvaise quantité. Donc forcément, il y a des soucis partout là où on est censé avoir du bon collagène.

Les symptômes les plus frappants sont de la fatigue chronique (être fatigué·e tout le temps et plus facilement que d’autres) et des douleurs chroniques (pas une seule seconde sans avoir mal). Il y a plein d’autres symptômes : la peau et les articulations élastiques (hyperlaxité), une mauvaise cicatrisation, des difficultés a tenir debout ou marcher, des problèmes respiratoires ou digestifs, des troubles cognitifs comme des troubles de la concentration, des trous de mémoire, des DYS (dyslexie, dyspraxie, dyscalculie…), de l’hyperactivité (oui avec la fatigue chronique, je vous laisse imaginer).

C’est une maladie qui empêche de faire beaucoup de choses, et elle est très peu connue et sous-diagnostiquée actuellement. Les personnes qualifiées pour poser un diagnostic sont peu nombreuses, les médecins non spécialisés ne connaissent presque pas (ou mal) cette maladie, ce qui fait que les années sont souvent longues avant un diagnostic et une mise en place d’aides appropriées. Ah oui ! Et comme c’est une maladie chiante jusqu’au bout, c’est génétique et souvent associé à d’autres choses, type TDAH (hyperactivité), endométriose, TSA (trouble du spectre autistique), SAMA (syndrome d’activation mastocytaire : allergies démultipliées et imprévisibles)… Sympa !


3) Quel a été ton parcours scolaire. As-tu connu des difficultés à cause de ta santé ?


Ma scolarité a toujours été chaotique ! J’avais déjà des problèmes de santé quand j’étais à l’école primaire, couplés à des phobies scolaires à cause du harcèlement que j’y subissais. J’étais surtout fatigué·e, j’avais du mal à me concentrer, à retenir les informations. A mon entrée au collège, le harcèlement a continué, les phobies scolaires aussi.

Le symptômes grandissaient, commençaient à prendre plus de place, mais les professeurs ne me croyaient pas, et me refusaient souvent les aides que j’avais mises en place en version home-made. J’avais mal aux chevilles et aux poignets, je portais des doc martens et des gros bracelets pour me maintenir. Parfois, c’était des corsets pour aider mon dos. Plusieurs fois, c’était des mitaines pour maintenir mes doigts, mitaines qu’on me forçait à enlever. J’ai été dispensé·e de sport à cette époque-là, mais avant que ça soit le cas, on me laissant faire des malaises en gym comme si de rien n’était. J’avais en quasi permanence des bandages autours des poignets pour me maintenir durant le sport, mais je simulais visiblement. Je faisais du handball, puis j’ai fait du théâtre en extra scolaire, que j’ai dû arrêter à cause de ma santé.

J’ai reçu mon diagnostic à mon entrée au lycée, ce qui m’a permis d’avoir un peu plus d’aménagements.

J’étais en lycée de campagne, la plupart des aménagements, les profs n’avaient jamais eu à les mettre en place. J’étais le cobaye, forcément ça c’est pas super bien passé. Entre les fausses infos, les erreurs, les pertes de dossiers, la violence des profs… J’ai eu la chance à cette époque d’avoir des profs qui m’ont donné des cours gratuitement sur leur temps perso pour me faire rattraper mon retard, ça m’a redonné un peu de courage !

Puis je me suis orienté·e en littéraire, avec un décrochage scolaire plus important chaque trimestre, jusqu’au bac, que j’ai obtenu on ne sait comment. J’ai fait des études dans le domaine des bibliothèques pendant un an, puis j’ai décroché car l’administration ne suivait pas au niveau de mes aménagements pour les partiels (pertes de dossier, encore, on adore), j’ai donc fait un service civique dans le social en attendant et actuellement je suis sur le point de partir en études et alternance pour être libraire. Sacré parcours !


4) Pourquoi avoir choisi de témoigner via ta BD les galères d’un Panda ?

C’est venu seul. J’aurais pu passer par le roman, je m’en serais probablement mieux sorti·e, mais c’est la BD qui m’est tombée dessus. Ça fait plus d’une dizaine d’années que j’écris beaucoup, j’ai écrit des articles, des débuts de romans, des nouvelles, des discours, des lettres ouvertes, enfin toutes sortes de choses. Ça m’a toujours plu. Le dessin aussi, mais c’était moins « inné » (ni le dessin, ni l’écriture ne sont des dons, c’est de la pratique pure). J’y trouvais moins d’attirance, ça m’ennuyait plus facilement.

J’ai toujours préféré l’Art dans lequel tu plonge les pattes et tu les ressors pleines de colle, de terre, de fil, de papier. Actuellement mes BD prennent donc plus la forme de collages et je m’épanouis dedans, car ça mêle tout simplement deux choses que j’adore. Mais en soi, ma BD principale est une BD simple, car c’était spontané. J’ai trouvé un coin de table, une feuille, un stylo, et j’ai dessiné l’introduction. Voilà, c’était fait. C’était pas réfléchi. C’était ce dont j’avais besoin sur le coup.

Puis ça a plu, j’ai continué, et nous y voilà maintenant, avec une dizaine de plus ou moins longues BD à mon actif. Avec mes dernières, celles en collage, je m’amuse à réfléchir de ce qui fait une BD une BD. Je joue sur les codes tout en essayant de rendre tout ça le plus spontané possible. Je fais confiance à mes coups de tête !

5) Ton style est pop et coloré, par qui/quoi as-tu été inspiré·e ?


Je trouve ça toujours compliqué de décrire mes influences. Mon influence, c’est le monde dans lequel je vis. Je regarde autour de moi, je vois le vert des arbres derrière ma baie vitrée, les bouquets de fleurs blanches, vertes, roses, violettes sur la table, les murs jaunes et bleu, la cuisine rouge… Tout est coloré, pourquoi mon travail ne le serait-il pas ? Les gens ont souvent peur du « pop et coloré » comme tu l’appelles. Je me balade dans la rue avec mes doc rouges vernies, mon pantalon tartan, mon gilet de mémé multicolore et mes cheveux roses, souvent ça fait tourner les têtes. Pourtant c’est si beau les couleurs ! Pourquoi on devrait se restreindre à une palette de couleur, au fade, au noir, au gris, au marron ? Très peu pour moi ! Alors voilà, mon inspiration c’est la vie, c’est ma personnalité, c’est comme ça que je la retranscris le mieux !


6) Quel·les sont tes artistes préféré·e·s ?


Je prends des petits bouts des artistes que je croise sur ma route, alors la route est longue ! Pour parler des classiques, je dirais que ça passe forcément par du Victor Hugo. J’ai pioché un peu de fantasy chez Lovecraft, un peu d’éveil de conscience chez Orwell. Je me suis beaucoup façonné
dans les dessins animés, puis les mangas, que je les aimés ou non. J’ai toujours beaucoup été inspiré·e par les œuvres de Miyazaki, des studio Ghibli de manière plus générale, et par les musiques de Joe Hisaichi en passant. Un peu de Burton, du Olivier Ledroit et du Sandrine Gestin, du Pierre Dubois, du Benjamin Lacombe aussi. Beaucoup de chansons françaises aussi, mais surtout des petits bouts des petits artistes que je rencontre sur ma route. Difficile d’en faire une sélection courte, il y a tellement d’artistes qui font un travail magnifique !


7) Tu as fondé un webzine, peux-tu nous en parler ?


Pendant la quarantaine due au Covid-19, j’ai décidé de mobiliser une poignée d’artistes pour monter un petit zine au sujet de la situation. J’ai passé un petit appel sur les réseaux sociaux, et je me suis rapidement retrouvé·e avec 8 artistes au travail pour la création d’un webzine de 45 pages ! Il porte le doux nom de « zine de la queerantaine » et est disponible en libre lecture sur mon site internet. Il y a des passages tout doux, d’autres plus compliqués. On y parle validisme (oppressions subis par les personnes en situation de handicap), troubles du comportement alimentaire, motivation, santé mentale, occupations, cuisine et travail à domicile, tu verras c’est super chouette !


8) Pratiques-tu d’autres formes d’Art ?


Ce qui est bien avec l’art, c’est que tu peux y mettre tout ce qui implique ton imagination et ta personne. Alors oui ! Comme expliqué un peu avant, je pratique le dessin et la peinture, mais aussi le collage. Je fais du bricolage aussi (enfin j’apprends) souvent à partir de matériel de récupération je couds (à la main, vu que je sais toujours pas me servir d’une machine), je customise ce qui me tombe sous la main, difficile de trouver dans mon placard un pantalon, une veste ou un sac qui soit dans son état d’origine. J’ai d’ailleurs eu mes débuts en temps qu’artiste en customisant des chaussures !

Je me maquille beaucoup, c’est plutôt cool d’utiliser son corps comme un bout de papier, tu le transporte, tout le monde le voit, les gens s’improvisent critique d’art. J’ai un attrait particulier aussi vers les déguisements et cosplay, allant de paire avec la couture, la customisation et le maquillage, même si les occasions de ressortir mes costumes du placard se font rares. J’ai créé des bijoux aussi à une époque, actuellement j’aime bien travailler dans ce qui est un peu plus du domaine de la communication, faire des petites affiches, des visuels sympas. Je chante pas mal, mais je ne joue plus d’instrument même si je suis passé·e vite fait par la flûte traversière et le piano. Je cuisine aussi, je trouve que c’est une chouette forme d’art parfois. Enfin bref, de l’art, partout, au quotidien, et c’est cool.

9) As-tu d’autres projets sur le feu, Panda ?


Je penses que je dois avoir environ 10 nouvelles idées par jour, donc oui, beaucoup ! Actuellement, je travaille sur plusieurs d’entre eux. Je participe au Trans Day of Remembrance. [NDLR : journée de commémoration des personnes trans victimes de meurtres transphobes]. Je vais participer à des ateliers qui sont des tables rondes avec la Féministerie. Ce sont des ateliers en ligne à prix libre à partir de 7€. Le premier sera sur la commercialisation de nos luttes. Je vais lancer une cagnotte et un financement participatif pour acheter des meubles.

Je vais m’installer dans un atelier d’artiste. J’ai aussi le projet des faire des formations pour accueillir les personnes LGTBQI+ et/ou des personnes en situation de handicap dans le milieu associatif.

Je travaille activement également sur une version audio de ma BD Les Galères d’un Panda (mais chut, c’est pas encore annoncé officiellement 😉 )puis sur d’autres plus petits, des BD, des nouveaux articles sur ma boutique en ligne, ce genre de choses. Sur le long terme, il y aura probablement d’autres tomes des Galères d’un Panda, puis je l’espère un recueil de mini BD et un livre illustré pour les enfants sur un tout autre thème. Non, me reposer n’est pas dans mes projets ahah.


10) Pour terminer, quelles sont tes séries/films/livres/autres de pop culture préférés ?

Comme dit tout à l’heure, j’ai un gros penchant pour l’animation japonaise et les univers fantastiques. Mon film de Miyazaki préféré est Le Château ambulant, impossible de dire mon Burton préféré par contre ! En animé, j’ai particulièrement aimé Death Note comme grand classique, puis Deadman Woderland et Samouraï Champloo. Pour les séries, ces dernières années j’ai particulièrement apprécié Orange is the new black et Sense 8 pour les pistes de réflexion qu’elles m’ont apportées.

J’aime particulièrement le travail de Banksy et de bien d’autres artistes urbains. Je n’ai jamais été trop jeux vidéos mais des rares que j’ai testés je me rappelle avoir eu un faible pour Kingdom Hearts et les Final fantasy sur les premières DS. En BD c’est très varié, rarement une œuvre préférée par dessus toutes les autres, mais je vous recommande vivement d’aller vous intéresser au travail de Charlie Genmor, Shyle Zalewski, Sophie Labelle ou encore Emma !

Pour en savoir plus :

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Tsilla Aumigny

Rédigé par Tsilla Aumigny

Rédactrice en Chef, ex-Enseignante en Lettres Classiques certifiée, Autrice de roman, Scoute toujours, Jedi à ses heures perdues, Gryffondor.

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