Le Joker est apparu dans Batman #1 en 1940, un an après la création de Batman lui-même. Depuis, il est devenu l’antagoniste le plus emblématique de l’univers de DC Comics, incarnant le chaos face à l’ordre et servant de miroir déformé à Batman. Mais contrairement à de nombreux personnages de comics, ses origines ont été constamment réinterprétées, laissant planer un voile de mystère sur son passé. Cette ambiguïté a fait du Joker une figure fascinante et effrayante, toujours imprévisible.
Les origines du mot Joker : un nom qui vient… d’une erreur de prononciation !
Initialement, ce nom provient du jeu L’euchre ou eucre, prononcé en Allemagne et en Alsace « Juker », qui par une erreur de prononciation, fut popularisé sous le nom de « Joker ». Le Joker est une carte introduite en 1870 dans le jeu des sept familles, en tant que carte la plus forte. Il fut ensuite édité en 1902 par les maisons Camoin, Fossorier, Amar et Cie qui obtinrent l’accord légal de le reproduire dans leurs jeux.[1]
Représenté par un bouffon, cette nouvelle tête s’insère dans l’univers des cartes, lesquelles représentaient en France des rois célèbres (le roi de cœur était par exemple Charlemagne), des personnages bibliques (comme Rachel, la dame de carreaux) ou des guerriers légendaires tels Lancelot, le valet de trèfle.
Quelques mots sur sa représentation : pourquoi le Joker est-il un bouffon ?
Si le bouffon est si puissant, c’est parce qu’il était le seul à pouvoir se moquer des Rois à la Cour ! Il peut parler quand il le souhaite, interrompre sa Majesté, et donner son opinion sans être puni. Or, la parole à la Cour est un pouvoir, et elle l’a toujours été, surtout dans l’Antiquité.
L’on parle déjà des bouffons chez les Grecs, et notamment Priscus en 449.[2] Il existait même un dieu dans le Panthéon qui leur était consacré : Momos, personnification de la raillerie, des jeux de mots et des critiques moqueuses. Portant une Marotte (le fameux couvre-chef plus tard orné de clochettes qui inspirera la coiffe d’Harley Quinn dans sa première version), cette divinité mineure était le fils de Nyx (la Nuit) et d’Erobos (les Ténèbres), suivant les mythologies. Il était donc le frère d’Hypnos (le sommeil), Thanatos (la mort), et des Kérès (Eurynies).[3]
Mythologiquement, tous les avatars du bouffon sont donc associés au monde de la Nuit et des Ténèbres, de la Mort et du sommeil, en s’opposant à des divinités comme Euphémée, la déesse des louanges.
D’abord associés à la Royauté, les bouffons deviendront de plus en plus populaires, et des figures importantes lors des carnavals médiévaux, des foires, et de la fameuse « fête des fous » que l’on voit dans le roman Notre-Dame de Paris. Le carnaval était alors un moment de grande fête au cours duquel les codes du mondes étaient inversés : le beau devenait laid et le laid devenait beau. Se tenant dans la période précédant le carême, lequel exigeait un abandon total à Dieu, le Carnaval était une fête qui permettait de s’adonner à la folie. Rapidement, la figure du bouffon fut donc associée à celle du renversement du monde, de ses codes, à la fête, et aux foires.[4]
En cela, dès le Moyen-âge, la bouffonnerie devint un registre littéraire, dans lequel l’auteur réalisait une satire théâtrale, sous couvert d’humour. L’humour des bouffons, ou des fous du Roi, est trivial, versant souvent dans le grotesque et la démesure. Pour autant, ce divertissement était rarement dénué d’esprit. Dans La Nuit des rois de Shakespeare, Feste, le bouffon, est décrit comme « assez sage pour faire le fou ».[5] Dans de nombreuses représentations de la commedia dell’Arte, Arlequin (qui inspirerait le nom d’Harley Quinn) symbolise à la fois les ténèbres et la lumière, la sagesse, et la folie, qu’il semble impossible de dissocier, comme deux faces d’une même pièce.
Protégé par les édiles, le bouffon incarne un personnage en marge de la Société, à qui tout est pardonné, et à qui tout est permis. Profondément ancré dans le système dont il se moque, le rôle du bouffon est de donner à voir une autre réalité que celle imposée par l’étiquette de la Cour : une réalité triviale, sans masque, sans filtre. Il remet en cause le monde établi. Il incarne les ténèbres en plein jour, l’ambivalence de la sagesse et de la folie, le renversement des codes, la satire, la moquerie.
Les origines du Joker de Batman : L’homme qui rit de Victor Hugo

Très inspiré par le baroque de Shakespeare, Victor Hugo s’intéresse à son tour aux personnages de bouffons et de saltimbanques, parfois cyniques, qui tournent en dérision et critiquent les puissants. On trouve ainsi quatre bouffons dans sa pièce de théâtre Cromwell, puis le célèbre Triboulet dans la pièce Le roi s’amuse. (Qui inspirera Verdi pour l’opéra Rigoletto.) Dans son roman médiéval Notre-Dame de Paris, il met en scène la fête des fous, au cours de laquelle le difforme Quasimodo est élu pour un jour Pape des fous.
Victor Hugo, écrivain fasciné par les contrastes, travaille aussi à travers ces œuvres sur le concept du clown tragique : l’homme destiné à faire rire et que personne ne prend au sérieux, qui est en réalité sombre et malheureux.
C’est là le drame de Triboulet dans la pièce Le roi s’amuse et de Quasimodo (qui fait rire par sa difformité) dans Notre-Dame de Paris en 1831. Puis de Gwynplaine dans L’homme qui rit en 1869 : un enfant qui a été défiguré par un sourire artificiel taillé au couteau, pour servir de monstre de foire en ayant l’air de rire constamment. Devenu jeune homme, Gwynplaine découvre qu’il a des origines nobles et tente de reprendre son rang dans la société. Mais il échoue à cause de son visage qui empêche ses pairs de le prendre au sérieux. L’Homme qui rit est, avec Notre-Dame de Paris, le deuxième roman néo-gothique de Victor Hugo.[6] Il inspire énormément la pop culture, notamment les décors de cirques et de fêtes foraines sombres chez Tim Burton et dans les mangas.
L’exemple le plus connu de personnage inspiré de Gwynplaine est bien sûr le Joker dans Batman, qui a différentes backstories selon les versions. Le film le plus récent, Joker (2019) avec Joaquin Phoenix, reprend directement l’idée de l’opposition tragique entre la vocation de faire rire et la vie en réalité très sombre du personnage.
La Genèse du Joker dans Batman : Mystère, Tragédie et Polyvalence
La Création et les Premiers Pas du Joker
Le Joker de Batman a été créé par Bill Finger, Bob Kane et Jerry Robinson. Bien que les récits sur sa conception varient, Robinson affirme avoir proposé l’idée d’un méchant ressemblant à une carte de Joker, tandis que Kane et Finger se sont inspirés de l’apparence de Conrad Veidt dans le film expressionniste allemand The Man Who Laughs (1928) de Paul Leni, adaptation du roman de Victor Hugo.[6]
Dans sa première apparition, le Joker est un génie criminel sadique, introduit comme un meurtrier en série qui utilise une toxine pour tuer ses victimes en laissant sur leurs visages un rictus macabre. Contrairement à de nombreux autres méchants de l’époque, il survit à la fin de l’histoire, posant ainsi les bases de son rôle récurrent dans les aventures de Batman.
Origines Floues : Le Joker et le Red Hood

Pendant plusieurs décennies après sa création, les origines du Joker restent intentionnellement vagues. Il est simplement un méchant insaisissable, dépourvu de passé clair. Cependant, dans les années 1950, l’idée de l’identité du Joker en tant que « Red Hood » commence à émerger. Dans Detective Comics #168 (1951), il est révélé que le Joker était autrefois un criminel connu sous le nom de Red Hood. Lors d’un braquage à l’usine chimique Ace, il tombe dans une cuve de produits toxiques alors qu’il tente de fuir Batman. Cette exposition chimique lui blanchit la peau, lui teint les cheveux en vert et lui donne son sourire figé, marquant sa transformation en Joker.
La Tragédie Réinvente le Personnage : The Killing Joke (1988)
L’une des versions les plus influentes des origines du Joker est présentée dans The Killing Joke, écrit par Alan Moore et illustré par Brian Bolland. Ce récit explore le passé du Joker à travers des flashbacks. On y découvre qu’il était autrefois un comédien raté, luttant pour subvenir aux besoins de sa femme enceinte, Jeannie. Poussé au désespoir après avoir perdu son emploi, il accepte d’aider deux criminels dans un braquage, jouant le rôle du « Red Hood ». Cependant, la tragédie frappe : sa femme meurt accidentellement avant le braquage, et le plan tourne mal lorsque Batman intervient. Dans sa fuite, il tombe dans une cuve chimique, un événement qui catalyse sa descente dans la folie.
Ce récit illustre la philosophie du Joker selon laquelle « il suffit d’un mauvais jour pour rendre quelqu’un fou ». Cependant, il est important de noter que même cette origine est présentée comme potentiellement erronée, le Joker lui-même déclarant : « Parfois, je me rappelle mon passé d’une manière, parfois d’une autre… Si je dois avoir un passé, je préfère qu’il soit multiple et au choix. » Cette ambiguïté renforce le mystère autour du personnage.
Les Réinventions Modernes : Batman: Zero Year et Three Jokers
Dans les récits modernes, les origines du Joker continuent d’être revisitées. Dans Batman: Zero Year (2013-2014), écrit par Scott Snyder, le Joker est introduit comme un criminel connu sous le nom de Red Hood One avant sa transformation. Ce récit approfondit son rôle dans les débuts de Batman, tout en réaffirmant le lien entre le Joker et l’usine chimique Ace.
En 2020, Geoff Johns et Jason Fabok publient Batman: Three Jokers, une série qui propose une nouvelle interprétation audacieuse. Selon ce récit, il existe en réalité trois Jokers distincts : le « Criminel » (l’incarnation originale), le « Clown » (plus farfelu et cruel) et le « Comédien » (inspiré de The Killing Joke). Ce concept explore l’idée que le Joker est autant un symbole qu’un individu, s’adaptant aux époques et aux contextes.

Le Joker et Gotham : L’Homme contre le Mythe
Le Joker n’est pas simplement un personnage isolé ; il est une personnification du chaos et une force opposée à la croisade ordonnée de Batman. Tandis que Batman lutte pour imposer la justice et le contrôle à Gotham, le Joker agit comme un agent du désordre, défiant les normes sociales et morales.
Cette dynamique est mise en avant dans des récits comme Batman: White Knight (2017-2018), où le Joker, temporairement guéri de sa folie, devient Jack Napier, un homme rationnel qui cherche à exposer les échecs de Batman et qui a été introduit dans le Batman de Burton. Ce récit inverse les rôles traditionnels, montrant que Gotham pourrait être tout aussi corrompue par la croisade obsessionnelle de Batman que par la folie du Joker.
Le joker sur petit et grand écran : des costumes éloquents sur ses origines
Au cinéma et dans les diverses séries et animés, les origines du Joker ne sont jamais précisées. Néanmoins, son costume nous donne quelques précieuses informations. Initialement, le character design du Joker a été imaginé d’après une carte de bouffon, comme l’a dévoilé Jerry Robinson dans une interview accordée à The Comics Journal en 1994.[7] Dès lors, ce « Clown Prince du crime » sera associé à quatre couleurs principales : le violet, le vert, le orange et le rouge.
Le violet est associé à la magie, au mysticisme. Le vert est quant à lui plutôt un symbole de chaos, de toxicité, d’empoisonnement. C’est pour cette raison que le vert est l’une des couleurs principales de l’homme mystère ou de Poison Ivy. Quant au rouge et au orange, ils sont le fruit d’une esthétique clownesque, que Jerry Robinson admirait particulièrement.
Dans une discussion rapportée dans Batman: The Complete History (1999) de Les Daniels, Robinson aurait suggéré que le violet donnait au Joker une allure « plus grande que nature », presque surnaturelle, par opposition à la sobriété de Batman. Bob Kane, dans une interview pour le documentaire The Legends Behind the Comic Books (2007, archives posthumes), a expliqué que le Joker devait être « l’antithèse totale de Batman ».[8] Si Batman est sombre et discret, le Joker devait être inoubliable et flamboyant. Ce contraste s’incarne aussi dans leur personnalités respectives, en faisant d’eux deux personnages parfaitement opposés, et complémentaires.
L’évolution des costumes du Joker à l’écran : du Dandy au Gangster
Dans la première adaptation, le costume et le maquillage du Joker sont inspirés par l’iconographie clownesque. En effet, le Joker est davantage un comique qu’un prince du crime. Son costume est donc en parfaite adéquation avec cette version farfelue du personnage dont les plans machiavéliques se limitent à devenir champion de surf et kidnapper des scientifiques. Cesar Romero, son interprète, inventerait néanmoins le rire strident qui deviendrait iconique, et qui serait repris par tous ses interprètes, Mark Hamil ou Heath Leadger en tête.
Le costume du Joker est alors un costume 3 pièces, magenta, avec une chemise verte et un nœud indigo en soie. Le Joker porte également des gants. Dandy, le Joker fait davantage penser à une version moderne d’Arsène Lupin métamorphosé en clown, qu’à un mafieux. Les adaptations suivantes souligneront davantage son appartenance à la criminalité.
Jack Nickolson dans l’adaptation de Tim Burton a fait appel à Nick Dudman, un célèbre make-up designer pour lui conférer une dimension plus tragique. Son costume créé par Tommy Nutter serait inspiré par celui que porte le Joker dans The Killing Joke, renforçant encore par son apparence, son appartenance à la mafia. L’esthétique renvoie à des œuvres alors emblématiques, comme Le Parrain.[9] A l’image de ses origines réinventées -dans ce film, le Joker est Jack Napier -, cette version du Joker introduit la scène cinématographique de la métamorphose chimique, que l’on retrouverait notamment dans le premier Suicide Squad.
Dans les années 2000, sous la direction de Nolan, Heath Leadger reprend le flambeau, et propose une version plus sombre de cet extravagant personnage. Liddy Hemming, costumière, a créé un costume trois pièces qui le ferait paraître négligé, misérable, imprévisible, mais dangereux, à l’effigie d’artistes controversés comme Pete Doherty, Iggy Pop ou Johnny Rotten. Sous l’égide d’autres inspirations cinématographiques comme Alex DeLarge, protagoniste d’Orange mécanique, ce Joker semble plus réaliste, plus ancré dans le chaos de la réalité qu’il incarne parfaitement.[10] Portant des cicatrices dont les causes relatées changent à chaque interlocuteur qui le lui demande, ce Joker brise les codes de ses prédécesseurs.
Le suivant, interprété par Jared Leto dans Suicide Squad, tient plutôt son costume d’un gangster, avec sa chemise blanche, ses lourdes chaînes, et ses dents, sur lesquelles luisent des bagues argentées. Tatoué, maquillé plus légèrement, le Joker retrouve son aspect Dandy, avec sa canne, et le retour de son gant violet. La batte de baseball fait aussi son apparition. Si ce nouveau Joker a une apparence plus moderne et originale, son écriture n’est pas en adéquation avec son style vestimentaire, lequel lui confère la personnalité que Jared Leto n’a pas su lui donner.
Enfin, Joaquin Phoenix présente un Joker en marge de la société, sous l’identité d’Arthur Fleck. Ce sont donc les couleurs rouge et orange qui dominent son costume, tout droit sorti des années 80. Il semble briller à l’écran telle une flamme dans un univers morne et gris, car c’est le Joker qui incarne le plus l’idée d’une renaissance. Son maquillage reprend davantage l’iconographie clownesque de Romero, tout en lui conférant un air dangereux.
Contrairement aux autres, son costume n’est pas taillé dans des matières nobles, soulignant ses origines modestes, accentuant ainsi la satire sociale. Arthur Fleck, travaillant dans une agence de Clowns, et habitant dans un immeuble miteux avec sa mère Penny, devient le Joker après avoir été agressé par des traders de la Wayne compagny, qu’il a tué en représailles. Dès lors, son monde bascule, il perd peu à peu son humanité, et par ses actes, remet en cause l’ordre social établi.
Ces adaptations cinématographiques ont alimenté les comics, et surtout, l’iconographie des séries animées et des jeux vidéo.
En série et film animés et dans les jeux vidéo : le Joker, un prince de l’emprise
Les séries et films animés ont adopté des origines déjà connues du Joker et ont proposé de renouveler son personnage, grâce à des phénomènes d’emprise qui font basculer les héros du côté obscur.
De la renaissance de Jack Nieper à l’emprise de Robin
Les séries animées qui se déroulent dans l’univers de Batman ont toutes proposé des versions du Joker plus intéressantes les unes que les autres, à commencer par celle de 1992, surnommée Batman TAS. Le Joker, Mark Hamil en version originale, est un criminel sans pitié, qui maltraite sa petite-amie, Harley Quinn, créée spécialement à cette occasion. Sombre, traitant de sujets brûlants comme les relations toxiques ou la condition humaine, cette série a introduit un Joker cynique, dont la méchanceté gangrène même ses relations les plus intimes. Difficile de croire qu’une telle série ait été diffusée à un (très) jeune public.
La suivante The New Batman Adventures, et le film d’animation Batman Beyound : return of the Joker, poursuivraient dans cette veine, réinventant le design et développant le personnage qui serait toujours incarné par Mark Hamil. Dans The New Batman Adventures, le Joker est librement inspiré par la tragédie de Jack Nieper : un simple gangster dont l’esprit a basculé suite à un bain d’acide. Cet animé est aussi le premier à introduire le DCU à l’écran et mêler d’autres antagonistes de l’univers DC à celui de Batman, comme Lex Luthor, que le Joker rejoindrait pour former le gang « Injustice ».
Batman Beyound : return of the Joker se déroule quarante ans après la série The New Batman Adventures, Bruce Wayne âgé est le mentor du nouveau Batman, Terry McGinnis, un jeune délinquant reconvertit en super-héros. Le Joker, tué par Batman et Batgirl durant un combat épique dans l’asile d’Arkham, est alors de retour dans le corps de Tim Drake, l’ancien Robin, qui a déjà été sous l’emprise du Joker lorsqu’il était plus jeune. Enlevé, torturé et séquestré par le joker, Tim Drake lui avait alors révélé l’identité de Batman, et avait commencé à suivre ses pas. Prisonnier à son insu de son ancienne figure paternelle, et fâché avec Bruce Wayne qui s’est senti trahi, Tim Drake ignore que le Joker lui a implanté une puce électronique pour faire revivre son esprit et son ADN en prenant possession de son corps. Démasqué par le nouveau Batman, Tim Drake, père de famille, recouvrerait ses esprits et serait pardonné par Brunce Wayne.
Dans les jeux vidéos, le Joker renverse l’héroïsme !
La licence Batman est prolifique dans le monde des jeux vidéo. Active depuis 1986, Batman figure sur toutes les consoles, sur tous les supports. Certains jeux sont particulièrement connus et appréciés par les fans, tant pour leur gameplay que pour les fils narratifs qui déroulent de leurs histoires. Les plus célèbres sont certainement l’adaptation de Batman beyond : return of the Joker, développé par Sunsoft et Rigler studios, la saga Batman : Arkham de Rocksteady studios (qui inspirerait le film d’animation Batman : Assault on Arkham, reprenant des ficelles de Suicide Squad), et Injustice. Les jeux lego, faisant suite aux films d’animation, ont aussi connu un franc succès.
Batman beyound : return of the Joker reprend dans les grandes lignes l’intrigue du film d’animation, tandis que d’autres, comme Batman : Arkham ou Injustice dévoilent de toutes nouvelles histoires. Batman : Arkham Asylum, se déroule sur l’île d’Arkham où sont enfermés dans l’asile psychiatrique du même nom, les ennemis jurés du héros. Le Joker en prend le contrôle et tente d’attirer Batman dans un piège, l’obligeant par un chantage à la bombe sur Gotham City, à s’y rendre seul. Guidé par Oracle, Batman doit découvrir où se cache le Joker, qu’il finit par retrouver. Lors du combat final, ce dernier s’injectera un sérum le transformant en monstre, tandis que Batman, affecté lui aussi à cause d’une fléchette tirée par Titan, serait sauvé grâce à l’unique antidote.
Dans le deuxième volet, Batman : Arkham City, le Joker est toujours infecté par le sérum mortel. Il capture Batman et lui injecte son sang contaminé, afin de le tuer. Le prince du crime est alors hors de danger : il a trouvé un antidote fabriqué par Mr Freeze. Après de nombreuses péripéties, Batman sera sauvé par Talia, qui a volé l’antidote à Harley Quinn. Au cours du combat final l’opposant au Joker, ce dernier meurt, mais l’ombre de ses démons planent sur Arkham.
En effet, dans le quatrième volet de la saga (le troisième se centrant sur les origines), Batman : Arkham knight, Batman et ses proches, infectés par le sang contaminé du Joker, se transforment peu à peu en clown maléfique. Batman n’a lui-même pas été totalement guéri par l’antidote, et doit lutter contre l’esprit du Joker qui prend le dessus. Batman comprend alors que le Joker n’a peur que d’une seule chose : d’être oublié (thème qui sera d’ailleurs abordé dans les comics, films et série animée dédiée à Harley Quinn). Bien que victorieux de son combat spirituel, Batman aura perdu, impuissant, son alliée Barbara Gordon dans la bataille.
Cette idée d’un renversement du monde, de la transformation des héros en super vilains, est pleinement assumée dans Injustice: Gods Among Us, développé par NetherRealm Studios. Où les alliances entre vilains et super héros se forment dans un monde gouverné par un superman maléfique, devenu un véritable tyran, après avoir accidentellement tué sa femme, Loïs Lane.
Piégé par du gaz de épouvantail inoculé par le Joker, Superman est victime d’hallucinations. Croyant éliminer Doomsday, il tue Loïs dont le cœur est relié à une bombe, laquelle, sous l’effet de l’arrêt des battements cardiaques, fait exploser Metropolis. Dévasté, Superman exécute le Joker au cours d’un interrogatoire. Après plusieurs années chaotiques, il instaure un régime totalitaire tyrannique pour préserver la paix intergalactique. Seul Batman pourra le contrer grâce à l’intervention d’autres héros et du Joker, qu’il fait venir d’un autre univers. Contraints de s’allier, Batman et le Joker mènent les insurgés et le « Joker Clan », fondé par Harley Quinn en mémoire de son défunt petit-ami, à la victoire.
Pourquoi laisser le mystère subsister ?
Le mystère qui entoure les origines du Joker est l’un des aspects les plus puissants du personnage. Contrairement à Batman, dont le passé tragique est clairement établi, le Joker reste insaisissable, un puzzle sans solution définitive. Cette ambiguïté permet à chaque génération de lecteurs et de créateurs de réinterpréter le personnage en fonction des préoccupations et des peurs de l’époque.
- Dans les années 1940, il est un criminel excentrique mais dangereux, reflétant les récits noirs de l’époque.
- Dans les années 1980, il devient une figure tragique et psychologiquement complexe, en phase avec un public plus mature.
- Aujourd’hui, il est à la fois une icône culturelle et un symbole de l’imprévisibilité humaine, capable d’inspirer autant la terreur que la fascination.
Conclusion : Le Joker, une Ombre Éternelle de Batman
La genèse du Joker est marquée par la tragédie, la transformation et l’ambiguïté. Qu’il soit un comédien raté, un criminel opportuniste ou une incarnation pure du chaos, le Joker reste l’opposé parfait de Batman. Alors que Batman représente l’ordre et le contrôle, le Joker incarne le désordre et l’anarchie, faisant de leur affrontement une lutte éternelle entre des forces opposées mais interdépendantes. Ce mystère et cette dualité garantissent que le Joker restera une figure centrale et énigmatique dans l’univers de Batman pour les générations à venir.
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Sources :
Scientifiques
[1] Nikki Katz, The Everything Card Games Book: A Complete Guide to Over 50 Games, p. 128, (ISBN 1-59337-130-6)
[2] Priscus Panita, Excerpta et fragmenta, édition de Carolla Pia, Éditions W. De Gruyter, Berlin et New-York, 2008, 140 p. (ISBN 978-3-11-020138-3)
[3] Pierre Chompré, Dictionnaire abrégé de la Fable, p. 277-278
[4] Michel Foucault, Surveiller et punir: naissance de la prison, Gallimard, coll. « Collection tel », 2011 (ISBN 978-2-07-072968-5)
[5] Bertrand Dominique, Le Théâtre, Editions Bréal, 1996, p. 86
[6] Siegfried Würtz, Qui est le chevalier noir ? Batman à travers les âges, THIRD éditions, 2019 (ISBN 978-2-37784-120-2)
[7] Jerry Robinson, entretien avec Gary Groth, The comics journal, no. 271-272, 1994.
[8] Les Daniels, Batman : the complete history, San Franscico, Chronicles books, p.29-31, 1999.
[9] Nick Dudman, Entretien dans Trois couleurs, MK2, 26 janvier 2021.
[10] Lindy Hemming, entretien avec Steve J.Ray, Dark knight News, 23 février 2018.
Littéraires
Victor Hugo, L’homme qui rit, 1869.
Victor Hugo, Le roi s’amuse, 1832.
Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, 1831.

Rédigé par Steeve Henry
Médiateur, adoubé de la Grosdoigitude par Sir Marcus, fan de retrogaming, soirée jeux de société, raclette. Ingénieur à ses heures perdues, quand il ne geek pas.

Par Umeboshi
Rédactrice, Relectrice SEO, Community Manager, enfant prodige, passionnée d’univers gothiques, mangaphile, parle le japonais couramment, a rédigé une thèse de 80 pages sur JoJo’s Bizarre Adventure.

Et par Tsilla
Rédactrice en Chef, ex-Enseignante en Lettres Classiques certifiée, Autrice de roman, Scoute toujours, Jedi à ses heures perdues, Gryffondor.
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