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L’amour, le seul Graal de Kaamelott ? [THÉORIE]

Last updated on 2 mai 2023

Aujourd’hui, un dossier sur Kaamelott : et si le Roi avait déjà trouvé le Graal, Saint Calice (ou bocal à anchois selon certains) qui confère la vie éternelle ?

La série Kaamelott aborde avec un œil nouveau le Saint Graal, la quête du Calice sacré dans lequel Joseph d’Arimathie aurait recueilli le sang du Christ, ou la corne d’abondance offrant nourriture à profusion, selon les auteurs. Le Graal est aussi représenté comme un plat dans lequel baignerait la tête du roi Bran le Béni (une super légende celtique avec des combats badass et du sang qui a inspiré le personnage de Bran dans Game of Thrones), ou encore un chaudron, celui du dieu celte Dagda (qui n’était visiblement pas très doué puisqu’il a paumé son chaudron). Enfin, certains auteurs le représentent comme une pierre tombée du front de Lucifer.

La variété des représentations du Graal a été traitée par Alexandre Astier comme un leitmotiv récurrent (et par moi-même dans mon mémoire de Master que je vous invite à consulter ici). Dans Kaamelott, la Dame du Lac elle-même ignore à quoi ressemble le Graal et où celui-ci se trouve. Peut-être se trouve-t-il, comme dans les récits médiévaux, au cœur du château du roi Pêcheur ? Se trouve-t-il à Kaamelott ? A-t-il été abandonné dans une caverne lointaine, pour que, quelques centaines d’années plus tard, Indiana Jones le trouve ?

Plusieurs hypothèses seraient à considérer. Néanmoins, dans cet article, nous n’en retiendrons qu’une seule : et si le Graal était l’Amour ?

Pourquoi cette hypothèse cher-ère Etoilé-é ?

D’une part, les frères Astier semblent très attachés au concept d’empathie, tel qu’il est développé par Simon Astier dans Hero Corp (<3). Dans cette série que je vous conseille fortement, nous suivons John, un jeune homme, qui découvre ses pouvoirs de super héros. A la manière d’Anakin Skywalker, John est un personnage complexe et ambigu, généreux mais égoïste, hésitant à sombrer dans le côté obscur de son âme pour embrasser sa puissance et se protéger, ou devenir le héros qui sommeille en lui afin de protéger les autres. Dans la saisons 5, le personnage incarné par Lionel Astier expose froidement que l’empathie est la principale qualité des surdoués.

Vrai : les surdoués le sont avant tout parce qu’ils possèdent une intelligence émotionnelle hors du commun, ils n’ont juste aucune habilité sociale. Nous reviendrons sur cet aspect plus tard dans notre article, lorsque nous aborderons le cas de Perceval et de ses relations avec le roi. Nous verrons pourquoi Perceval est peut-être le seul personnage qui a tout compris à la quête du Graal.

Le Graal, un objet immatériel ?

D’autre part, il semble évident que le Graal est un objet à la fois connu et inconnu de tous. Le Graal n’est finalement peut-être pas matériel, raison pour laquelle il serait impossible de le toucher : dès lors, si le Graal n’est qu’un concept, pourquoi ne pas l’assimiler au plus beau de tous : l’Amour. « L’Amour, il n’y a que ça qui compte », comme l’expose Cécil, un politicien véreux, dans la dernière saison d’Hero Corp. C’est probablement la raison pour laquelle Arthur ne trouve pas le Graal : car il a perdu les amours de sa vie.

Le Graal dans Kaamelott : une quête et un amour impossible

Dans le dernier épisode du Livre VI, Dies Irae,[1] Arthur, allongé sur un lit, rêve de ses amours passés. Il se revoit, jeune, allongé sur des draps pourpres, Mevanwi au-dessus de lui. Il lui dit alors : « Rome, je l’ai laissée tomber ». Mevanwi répond : « Comme moi. ». Mevanwi, vêtue d’une robe rouge, se penche alors sur lui. La figure du personnage est masquée par le vêtement. La femme se relève. Ce n’est plus Mevanwi, mais Aconia qui se trouve au-dessus d’Arthur. Ils discutent alors :

« Aconia : J’ai froid.

[…]

Arthur : Et le fait d’être avec moi vous avez pas moins froid ?

Aconia : Tu as retrouvé le Graal ?

Arthur : Le Graal ?

Aconia : Oui, le Graal. Tu l’as retrouvé ?

Arthur : Non.

Aconia : Et ton alliance, tu l’as retrouvée ton alliance ?

Arthur : Non plus.

Aconia : Non plus.

Arthur : Mais maintenant, c’est trop tard. Je la retrouverai plus ».

Une alliance perdue

Aconia fait référence à l’alliance qu’Arthur a perdue en débarquant sur le sol breton. Par une analogie fondée sur un zeugma [figure de style qui consiste à associer deux mots de sens concret et abstrait, par exemple : j’ai pris une claque et la porte], le Graal est donc allié à l’anneau d’Arthur. Pourquoi Aconia lui demanderait-elle si il a trouvé le Graal alors qu’elle ne connaît même pas la mission divine confiée à Arthur ? Pourquoi employer le verbe « retrouver » alors qu’Arthur n’a jamais trouvé le Graal. D’ailleurs, l’a-t-il seulement cherché ? Pourquoi Arthur dirait-il à Mevanwi qu’il a laissé tomber Rome ?

Ces paroles sont ambiguës. Le Graal représenterait finalement l’Amour qui unit les personnages, leur donne foi, espoir. Arthur a laissé sombrer Rome comme sa relation avec Mevanwi, car il a préféré abandonner, par manque d’espoir. Ce qu’il a délaissé à Rome, ce sont ses amis décédés, l’Amour de sa première femme. Puis, il a abandonné peu à peu le reste : la quête du Graal, le pouvoir, Lancelot, Guenièvre, sa foi, l’espoir de donner un sens à sa vie lorsque Prisca lui a révélé qu’il était stérile.

Arthur aurait donc détenu entre ses mains son alliance et le Graal, mais il les aurait perdus et sacrifié à Kaamelott. Désespéré, il aurait tenté de redonner un sens à sa vie en accomplissant une nouvelle quête : celle de ses enfants. À défaut d’aimer une femme, il pourrait vivre un Amour inconditionnel avec la descendance qu’il espérerait avoir.

Madenn, le dernier espoir

La seule qui eût pu lui en donner, au cours de sa régence, est Madenn. Madenn est une paysanne qui a cru dans le premier Livre, qu’elle était enceinte d’Arthur.[2] Dans le cinquième,[3] une de ses amies révèle au fils de Pendagron que cet enfant n’était pas le sien et qu’il est décédé. Ces deux paysannes incarnent à l’écran les femmes de basse condition sociale au moyen-âge. Chacune d’entre elle a perdu au moins cinq enfants, à leur naissance ou en bas-âge. Elles représentent une réalité historique. En effet, au moyen-âge, les conditions d’hygiène en particulier dans les bourgs et les campagnes, ne sont pas favorables, malgré l’invention du savon et les constants progrès médicaux réalisés par les hôpitaux orientaux, notamment celui de Bagdad.

Beaucoup d’enfants meurent en bas âge, et une part non-négligeable de femmes meurt de la fièvre puerpérale, infection qui fait suite à un accouchement. A l’écran, Madenn et son amie incarnent donc une réalité historique à défaut d’incarner des personnages romanesques.[4] Si Madenn n’a pas donné d’enfant à Arthur, il n’est pas non plus impossible qu’il puisse toujours en faire avec deux autres femmes : Demetra et Anna, sa demi-soeur.

Demetra et Anna : un nouvel espoir ?

Demetra, s’est mariée avec Yvain, par intérêt. Si ce mariage lui a permis de s’élever au rang de femme de chef de clan, elle est néanmoins pauvre, et vit dans une cabane au milieu des bois. Elle ne prend pas part à leur quête du Graal, car elle est traitée comme une esclave par les deux compères. Arthur couche avec elle dans le Livre V,[5] alors que son beau-frère ne l’a pas touchée depuis longtemps.

Quant à Anna, elle demande à son demi-frère s’il prendrait plaisir à coucher avec elle. Arthur rétorque qu’ils n’ont pas le droit. Elle lui explique alors qu’ils le feront.[6]

Le fils incestueux dans l’univers Arthurien

La deuxième hypothèse semble davantage prometteuse que la première si l’on se réfère à l’univers arthurien de référence. Dans les récits médiévaux, Arthur a eu un fils avec sa demi-sœur Morgane ou Morgause la Fée. Le fils adultérin d’Arthur, s’appelle Mordret ou Mordred. Il plonge son royaume dans le chaos dans La mort du roi Arthur. A l’issue d’un combat final qui oppose les deux personnages, le roi et son fils disparaissent en s’entre-tuant. Avant de partir, Arthur jette Excalibur dans le Lac, et celle-ci est attrapée au vol par Viviane, la Dame du Lac. Sa main sort de l’eau et saisit l’épée. Puis, la fée Morgane conduit Arthur vers l’île d’Avalon.[7]

Dans les deux dernières saisons, l’importance du Graal est délaissée au profit d’une quête pour Arthur de son amour perdu et de son potentiel héritier. Dès lors, l’Amour devient l’enjeux primordial de la série, mais aussi, des objets de conquêtes pour les femmes. Dans Kaamelott, les femmes sont davantage actives que passives, alors que la plupart des hommes se laissent peu à peu aller dans leur inertie. Les femmes, elles, rêvent d’Amour, de pouvoir et de conquêtes : elles savent qu’elles doivent conquérir le cœur du Roi pour obtenir ce qu’elles désirent. L’intrigue, exclusivement centrée autour des hommes dans l’univers originel, se dérobe à ses codes dans Kaamelott, puisque les femmes deviennent le centre même de l’intrigue, en posant leurs propres enjeux.

Le Graal des femmes : l’Amour et l’héritier du Roi

Dans les Livres I à III,  Guenièvre tient le rôle de reine. Dans le Livre IV, Mevanwi s’en empare. Enfin, il revient à Guenièvre dans le Livre V, avant d’être repris par Mevanwi. Cependant, n’aurait-il pas dû revenir à Aconia, puisque celle-ci est la véritable femme d’Arthur, épousée en première noce ? Chacune d’elle pourrait avoir une prétention au trône. La première, qui aime sincèrement Arthur, est mariée à un autre homme. Ce mariage est illégal, mais pas illégitime. La seconde aime son meilleur ami alors qu’elle est son épouse officielle. Leur mariage est donc légal, mais illégitime, et sa légalité peut être contestée puisque le roi est déjà marié.

La troisième, semble préférer le pouvoir au roi, et leur mariage peut difficilement être qualifié de « légal », même s’il est légitimement fondé sur l’amour mutuel qu’ils se portent. Arthur n’est en fait marié à aucune femme, ou alors, il est uni aux trois à la fois. Peut-être est-ce la raison pour laquelle Arthur n’a jamais eu d’enfant, ni trouvé le Graal. L’amour qu’il éprouve pour Mevanwi et Aconia est à l’image de la quête Graal ou de son héritier : avorté. La quête d’Arthur est donc stérile, car ses amours sont des échecs. De plus, aucune de ses reines potentielles n’a jamais été enceinte de lui. Dans cette optique, Arthur est parti en quête de ses probables enfants illégitimes, accompagné par Guenièvre, son épouse officielle.

La promesse d’Aconia

Aconia a fait promettre à Arthur de ne jamais consommer son mariage. Arthur, pour conserver cet amour, puisqu’il a perdu l’alliance, décide alors de tenir parole et de ne jamais consommer son mariage avec sa première femme. Au Moyen-âge,[8] et bien plus tard, nombre de mariages furent annulés car ils n’avaient pas été consommés. Ce n’est donc pas seulement une promesse pour conserver son Amour pour elle qu’Arthur tient parole, c’est peut-être dans l’espoir de pouvoir annuler son mariage avec Guenièvre et filer le parfait amour avec Aconia.

Cependant il serait contraint de renoncer à ce rêve, d’accepter d’avoir perdu son alliance. Méléagant profiterait de la fragilité d’Arthur pour le pousser au suicide. Méléagant désire plus que tout mener les Hommes à leur sabordage : le terme est issu du vocabulaire spécialisé de la marine. Les navires sont sabordés par l’équipage, volontairement. L’équipage crée alors une ouverture des vannes ou des sas dans le but de couler leur propre navire. Cette métaphore évoque la tentative de suicide d’Arthur et de César, qui se sont ouvert les veines. Pour y parvenir, Méléagant utiliserait plusieurs stratagèmes.

Tout d’abord, Arthur passerait une nuit chez le pêcheur,[9] père des jumelles, ses maîtresses. Guenièvre s’étant faite piquer les pieds par des guêpes durant une promenade avec Yvain et Gauvain, Arthur est alors seul. Même s’il sait désormais que Madenn ne lui a pas donné d’enfants, il continue à s’accrocher à l’espoir qu’une des jumelles soit enceinte, comme le lui a suggéré le père de Madenn.

Le pêcheur : le détenteur du Graal ?

Il entre alors dans le phare du pêcheur. Les jumelles ne sont pas là, et le père confirme à Arthur qu’aucune d’elle n’attend un enfant. Arthur croit alors reconnaître la plage sur laquelle il a débarqué, une quinzaine d’années auparavant. Il confie à leur père que les jumelles furent les premières bretonnes qu’il rencontra.

Arthur explique ensuite au pêcheur qu’il ne sait comment rentrer à Kaamelott. Il demande s’il peut être raccompagné par un guide. Le pêcheur lui dit alors : « vous avez l’air crevé (…) Vous trimballez quelque chose, vous. En fait, vous m’faites peur. ». La syllepse de sens [figure de style qui consiste à faire un double sens à partir d’un même mot] « vous avez l’air crevé » renvoie non seulement à la fatigue, mais aussi, dans un registre familier, à la mort. Arthur est sur le point de basculer dans le monde des défunts. Cette ambiguïté renvoie aussi directement à l’essence même du Graal dans les récits arthuriens, qui se trouve dans le château du Roi pêcheur.

Le château du Roi pêcheur, un autre monde ?

Le château du Roi pêcheur ne se trouve pas dans un monde humain, ni en Enfer, ni au Paradis, il semble appartenir à un espace divin qui lui est propre. Le phare du pêcheur dans Kaamelott, est peut-être, comme le château du Roi pêcheur, un endroit magique, à la croisée des mondes : la terre, et la mer, Rome et Kaamelott, le monde des vivants et celui des morts. Le clivage fantastique du décor est à plusieurs reprises renforcé par des plans débulés (une image de « travers »), des images sombres, une ambiance tamisée dans le clair-obscur.

Après lui avoir courtement discouru, on retrouve les deux personnages discutant en tête-à-tête, sur la plage dans le plan suivant. La scène est filmée en plan de taille, lui conférant ainsi une dimension intimiste. Le pêcheur demande à Arthur pourquoi il est venu. « Vous recherchez vot’ descendance ? » le questionne-t-il. Arthur répond que la « pêche » n’a pas été bonne. Il est venu sans savoir jusqu’où sa quête allait le mener, et il ne s’attendait pas à revenir sans rien. Arthur n’a effectivement rien trouvé, si ce n’est sa propre perdition.

Les amours disparus

Le pêcheur compatit, car il attend lui-même son fils. Ce personnage ressasse sans cesse son inquiétude : son fils a disparu. Il ne s’est plus où se mettre. Arthur finit par le questionner à ce sujet. Le pêcheur lui explique que son fils est parti à la pêche, quatorze ans plus tôt. La date coïncide avec l’arrivée d’Arthur sur l’île de Bretagne. Les premières paroles échangées entre Arthur et les jumelles dans la saison VI donnent d’ailleurs une explication claire et nette à cette disparition.

Leur frère est parti tuer les légionnaires romains qui souhaitent accoster. Le jeune homme est donc sûrement mort, et le père est dans le déni, dans l’attente inespérée que son fils lui revienne. Arthur le rassure et lui dit de ne pas s’inquiéter. Arthur lui ment, car il se ment à lui-même. Il sait que le garçon ne reviendra jamais, mais comme le pêcheur, il est dans le déni de sa douleur. Il n’accepte pas d’avoir perdu l’Amour de sa vie, quatorze ans plus tôt.

Les lumières du Phare dans la quête d’Arthur

Sur le plan suivant, le pêcheur allume une bougie. Puis, il éclaire le roi sur un de ses rêves. Il lui explique qu’il rêve souvent qu’il tire une chaîne, sur le rivage, et que l’eau disparaît. Il croise les pêcheurs qui ont coulé depuis des millénaires et qui réparent leur coque. Le pêcheur leur crie alors qu’ils devraient saisir cette occasion pour s’enfuir.  Ils lui répondent qu’ils préfèrent rester, pour réparer leur navire, au cas où la mer remonterait à nouveau. Le pêcheur les insulte alors, puis se réveille. Le pêcheur adresse un message à Arthur, de façon implicite.

Comme les marins dans le rêve du pêcheur, Arthur a aussi la possibilité de s’enfuir, et de ne pas se laisser emporter par la mer, après avoir échoué dans ses fonds. Le sens de ce rêve est d’ailleurs explicité par le dernier échange entre lui et l’ex-roi de Bretagne. Le pêcheur s’excuse pour le ton de la conversation et pour n’avoir parlé que de son fils. Le roi lui dit qu’il n’a pas parlé que de ça. Le pêcheur le contredit : « Si, si, je vous jure. J’ai parlé que d’ça. »

Un passé commun

En fait, Arthur et le pêcheur ont un passé commun. Tous deux ont perdu l’Amour de leur vie, quatorze années auparavant, mais pour des raisons différentes. Tous deux attendent son retour. Le pêcheur représente aussi le père endeuillé qui sommeille en Arthur : celui qui attend l’avènement de sa femme et de son fils depuis quatorze ans. Tous deux sont des pêcheurs, au sens propre et au sens figuré. Arthur est un fils disparu pour Anton, et le pêcheur représente un père inquiet, un père qui n’a jamais pu faire le deuil. Il incarne Anton. Arthur comprend alors la douleur que peut ressentir un père qui a aimé son fils, quand le fils disparu n’est jamais revenu près du père. Un tel amour rend fou. 

Suite à cette discussion, Arthur s’endort, et fait un cauchemar. Il entend dans le phare des rires d’enfant. Il sort et demande s’il y a quelqu’un. Le ciel est couvert de nuages noirs et menaçants, et personne ne lui répond. Seule dansent dans le vent les flammes du phare. Puis, se taisent les rires des enfants. Les feux du phare s’éteignent soudain, comme l’espoir du roi.

L’Amour familial : un leitmotiv dans les réalisations d’Alexandre Astier

L’amour est souvent au centre des réalisations d’Astier, comme dans son one man show Que ma joie demeure !,[10] ou du film David et Madame Hensen.[11]Ces deux réalisations traitent  de la dépression d’un parent ayant perdu un enfant. Dans Que ma joie demeure !, Alexandre Astier porte le costume de Bach, qui ne comprend pas pourquoi il se sent mal. Sur le fil de ses récits introspectifs teintés d’humour et de cynisme, le spectateur apprend que Bach a perdu nombre de ses enfants. Le rideau se lève finalement sur Bach qui s’est révélé à lui-même. Il est triste. La chute est à la fois ironique et tragique, comme celle de David et Madame Hensen.

Dans ce film, Alexandre Astier incarne David, un ergothérapeute travaillant au sein d’une riche clinique suisse. David est en couple avec Clémence. Clémence a un frère dont elle veut fêter dignement l’anniversaire, en famille. Ils ont perdu leur père depuis peu. Ce jour-là, David est obligé de prendre en charge Madame Hensen, une femme souffrant d’amnésie suite à un accident de voiture. Celle-ci est incarnée par Isabelle Adjani. Au cours d’un road trip qui les mènerait dans l’ancienne demeure de Madame Hensen,  David découvrirait que Sean, le fils de Madame Hensen, est décédé dans l’accident.

Le thème du deuil dans Kaamelott

La série aborde aussi ce thème, à travers la quête d’Arthur, qui est en fait une quête d’Amour : amour marital, amour filial. Dès le Livre II, le personnage est en quête de cet objet sacré. Lors d’une entrevue avec Tegeirian, une des prétendantes d’Arthur, ignorant qu’il est roi, elle lui demande : « Il sort jamais ou quoi? (Arthur ne répond pas) Remarquez, je vois pas pourquoi il sortirait. Il doit avoir tout ce qu’il veut, au château (Le roi reste silencieux) »[12] Le roi n’a pas tout ce qu’il désire puisqu’il lui manque des enfants et Aconia. Il est en manque d’Amour. Ce plan et ce dialogue le révèle.

Le Graal, symbole d’une quête

Le Graal devient le symbole de cette quête. Dans le dernier épisode du Livre VI, Arthur déclame à Perceval, hors champ :

                « Je suis dans l’espace, avec un vieux…[…] Quand je me suis réveillé j’ai tout de suite pensé à vous […] Et les vieux, y’en a toujours dans vos histoires à vous. Bref, je flotte dans l’espace…avec les étoiles et tout. Et y’a un vieux à côté. […] Et le vieux me fait : « Vous êtes prêt à voir le Graal ? »  […] Alors on se dirige vers une… une grande boule, mais en fait, c’est notre Terre à nous. […] On descend, on descend. On atterrit […] sur le territoire du Seigneur Dagonet. […] au bout d’un moment je me dis : « Merde… c’est le chemin de Kaamelott ici ! Oh […] le Graal il est pas à Kaamelott quand même ? » « Si » […] « Vous vous foutez de moi ? » […] On arrive à Kaamelott, la baraque vide. […] On continue, […] on arrive devant la porte de ma salle de bain : »Voilà, ouvrez, c’est la derrière. […] Là y’a la baignoire vide… enfin vide… y’a de l’eau mais y’a personne dedans. Et y’a du sang partout. […]

Il me fait : « Voilà ! C’est le Graal ! » « Quoi quel Graal ?  » […] « La baignoire c’est le Graal ? » Ouais, c’est le récipient qui a reçu le sang du Christ. » Alors là dans le rêve je lui mets une tarte au vieux… […] Pis […] c’est lui qui se retourne, qui vient, il me fout une avoine. […] Et il me dit : « Qu’est-ce que c’est que quelqu’un qui souffre ? Et qui fait couler son sang par terre pour que tout le monde soit coupable ? Tous les suicidés sont le Christ. Toutes les baignoires sont le Graal. Et vous savez qu’on s’est toujours demandé si y’avait pas une inscription au fond du Graal ! Eh ben oui y’en a une. Allez voir », qu’il me fait. Alors j’y vais. Et au fond de la baignoire y’a marqué : « Vous m’avez bien cassé les couilles. » Et boum je me réveille. ».[13]

Toutes les suicidés sont le Christ, toutes les baignoires sont le Graal

Arthur prononce ce soliloque après voir tenté de se suicider. Ce soliloque réfère aux différents motifs littéraires inhérents à la quête du Graal. Dans les récits arthuriens, un certain nombre de topoï [l’équivalent d’un cliché bien traité en littérature, mais utiliser un terme grec, c’était tellement plus classe] ont été réécrit sous les plumes des différents auteurs. Il y eut par exemple le passage où Arthur tire son épée du rocher, des duels entre deux chevaliers avec de la cervelle et du sang, le passage d’une rencontre entre un chevalier et un ermite, ancien chevalier errant devenu mentor à ses heures perdues.

Dans son rêve, Arthur frappe l’ermite et se fait frapper par lui. Astier parodie à plusieurs reprises les légendes arthuriennes, ainsi le songe d’Arthur est-il traité de façon comique et tragique. Cet acte, qui semble drôle,  pourrait aussi signifier que le Roi a échoué à accomplir la quête du Graal.

Kaamelott, le Saint Graal ?

Malgré tout, l’ermite guide Arthur jusqu’au Graal. Tous deux atterrissent sur les Terres du Seigneur Dagonet. Sur celles-ci, dans la série, Lancelot a établi son camp militaire. Symboliquement, Arthur rallie donc le chemin qui le sépare de son ennemi à celui qui le mène au Graal.  Déjà, dans le Livre II, Bohort  suivant les conseils d’un ermite, fit entrer Arthur et Léodagan à travers un passage qui les menèrent à la salle du trône de Kaamelott. Bohort affirma que le Graal se trouvait à Kaamelott, dans la salle du trône. Arthur et Léodagan qui l’avaient suivi, pensèrent alors que Bohort s’était trompé, et qu’il n’avait pas compris l’indice que lui avait donné l’ermite. Pourtant, dans ce rêve, Arthur se retrouve dans son château.

Ce « vieux » pourrait être le Roi Pêcheur. Son château serait alors Kaamelott, mais un Kaamelott sans vie, où même la Table Ronde a disparu. Dans Kaamelott, le Graal n’existe que dans les rêves du roi Arthur. Ce rêve singulier mentionne la Terre. Le Roi flotte d’abord au-dessus, dans l’espace. Il est au-dessus des autres Hommes, comme un Dieu, ou peut-être comme un mort.  Pourtant, Kaamelott est vide. Toute noblesse, tout éclat, a donc laissé place à l’absence, au silence. Ce cheminement pourrait représenter le cheminement intérieur du roi Arthur qui était au-dessus de tout, et qui se trouve seul et déprimé dans son château.

Perceval, la fidélité et l’Amour qu’il porte à Arthur

Perceval est le seul personnage à qui Arthur se confie, le seul chevalier avec qui il déjeune en tête-à-tête. Arthur est à la fois agacé par sa paresse, mais émerveillé par sa naïveté. Si Perceval n’est pas cultivé, et ne possède aucune mémoire si ce n’est celle des règles de ses jeux, il a néanmoins la seule qualité essentielle qui fait de lui le dépositaire de cette confession : Perceval sait que la seule chose qui compte, c’est d’aimer. Il ne comprend rien à la quête du Graal, mais il a une forte intelligence émotionnelle qui lui permet de savoir d’instinct que seul l’Amour qu’il porte à Arthur importe.

Enfin, Arthur, contrairement à Perceval dans le Conte du Graal, demande où est le Graal. Ainsi, le Graal et le motif du chevalier trouvant le Graal sont-ils eux aussi désacralisés. Dans les récits chevaleresques, le Graal est le plus souvent trouvé par Perceval ou Galaad, fils de Lancelot.[14] D’ailleurs, dans Kaamelott, le Graal n’est pas transporté en un cortège, puisqu’il est une baignoire.

Le Graal dans la légende arthurienne

Originellement, d’autres objets accompagnent le Graal, le plus souvent la lance qui aurait percé le flanc du Christ, ou celle du Dieu celte Lug. Tout un cortège composé de belles demoiselles et damoiseaux se presse autour de l’objet sacré. Dans la série, le Graal a une dimension christique forte, puisque l’ermite affirme : « Qu’est-ce que c’est que quelqu’un qui souffre ? Et qui fait couler son sang par terre pour que tout le monde soit coupable ? Tous les suicidés sont le Christ. Toutes les baignoires sont le Graal ». Le Graal serait une corne d’abondance par laquelle coule le sang des suicidés.

Arthur : un personnage christique

Arthur a tenté de se saborder. Cette tentative fait échos à celle de César, dans le Livre VI. Tous deux sont des hommes pouvoir. Tous deux sont des figures christiques. La baignoire débordant du sang des suicidés matérialise leur sacrifice christique. Le Christ est celui qui souffre, qui se sacrifie dans l’espoir d’éclairer le monde. Arthur a le désir d’apporter la lumière du Graal à son peuple. Cette conception de la quête du Graal, est finalement contraire à celle exposée par certains récits médiévaux, comme La quête du Saint Graal. Dans ce livre, seul Galaad, élu du Graal, parvient à en devenir le roi.

Paradoxalement, ce récit a été influencé par les clercs. Alexandre Astier redéfinit donc le Graal et démontre qu’une quête du Graal, comme l’envisageait les clercs du Moyen-âge, n’est en fait qu’une quête du pouvoir, comme l’est celle de Lancelot. Cette quête est égoïste, contraire aux principes énoncés par le Christ. Arthur n’a quant à lui jamais désiré le pouvoir. Il est pourtant aimé par ses sujets, qui le surnomment « Arthur le Juste ».[15]Les chevaliers aiment aussi Arthur, Perceval et Bohort lui sont particulièrement fidèles.

Guenièvre, la plus fidèle

De tous, Guenièvre est celle qui l’aime certainement le plus. Elle lui a fait couler le bain dans lequel il s’est ouvert les veines. Malgré tout, elle trouve le courage de venir le revoir, dans le dernier épisode du Livre VI. Elle lui expose sa culpabilité, et ses remords. Elle fait des cauchemars depuis sa tentative de suicide et a toujours en mémoire l’image du sang qui dégouline de sa main sur les dalles de pierre. Arthur lui explique alors qu’il voulait que les autres se sentent coupables de son mal-être. Peut-être ne voulait-il pas porter seul ce fardeau.

L’Amour et le Graal : un bain de sang ?

D’ailleurs, les bains et baignoires sont le thème central de l’épisode L’enfant qui criait au Loup. Tout d’abord, Mevanwi tente d’initier Karadoc aux principes fondamentaux de l’hygiène, tandis que sur le plan suivant, Lancelot prend un bain dans un lac. Le bain du chevalier errant est semblable à celui que prend Perceval, lors de son baptême à la fin du Livre IV. Lancelot fait symboliquement table rase de son passé, et se prépare à sa nouvelle vie, sous l’influence néfaste de Méléagant.

Puis, Karadoc est dans son bain, en compagnie de sa femme. L’eau est trouble. Mevanwi tente alors de convaincre son mari d’imiter Arthur, qui prenait trois bains par semaine. Arthur a en effet reçu une éducation romaine, et il a l’habitude de se laver. En fait, Aconia elle-même lui en a donné l’habitude. Lors de leur première rencontre, elle lui somme de manger et de prendre un bain. Aconia doit éduquer Arthur. Il s’agit de sa première leçon.[16]

Le bain chez les Romains

Chez les Romains, prendre un bain n’est pas seulement un acte d’hygiène, c’est aussi un acte social. Dans les thermes, privés ou publics, les romains se réunissaient durant l’otium. L’otium était le temps de la journée durant lequel les romains ne travaillaient pas. L’otium était le temps des plaisirs,  un temps éloigné des préoccupations quotidiennes, par opposition avec le negotium, le temps du labeur. Avec Aconia, Arthur goûte donc aux joies de l’otium, temps du plaisir intellectuel d’abord, puisqu’il se forme à la stratégie militaire, à la Rhétorique et à la Littérature. Il savoure les plaisirs amoureux, ensuite. Otium a donné le substantif « oisiveté » et l’adjectif « oisif ». Les termes n’étaient pas connotés péjorativement en ancien français. Au contraire, les nobles jouissaient de l’oisiveté.[17]

Ils se laissaient aller dans les délices de ces plaisirs courtois, comme dans le Roman de la Rose de Guillaume de Lorris. Ici, ce sont des notions anachroniques qui sont associées : l’otium romain et l’oisiveté médiévale. La courtoisie caractérise également l’attitude d’Arthur vis-à-vis des femmes, d’après Aelis, sa maîtresse.

Le bain, lieu associé à l’Amour dans Kaamelott

Karadoc en discute avec elle dans un bain, au cours de cet épisode. Contrairement à Arthur, il ne se montre pas courtois avec les filles, comme Aelis le lui fait remarquer. Dans Kaamelott, le bain est le lieu associé à l’Amour.  Arthur retrouve souvent Démétra dans son bain.

Le bain est aussi associé au baptême. Le Livre IV se termine d’ailleurs sur le baptême de Perceval. Le bain est donc aussi lié au Graal, car il l’est au baptême. Comme le souligne Guenièvre dans le dernier épisode de la saison V : « Un bain ça ne sert pas qu’à se laver (…) ça sert à faire le vide (…) il faut arrêter de penser au moins le temps du bain ». Arthur soupire alors : « Moi, c’est terminé. »

            En définitive, Arthur commence son éducation par un bain, et termine désespéré dans un bain de sang.

En conclusion,

À travers ce cheminement, à travers les quêtes d’Arthur : celle du Graal et de ses enfants, Alexandre Astier voulait peut-être explorer le sens de sa vie et celui de l’Amour, puisqu’il a affirmé : « J’aurais pas pu vivre sans enfant…et c’est ça le thème de la saison cinq ».[18] En soit, les frères Astier semblent défendre des valeurs essentielles qui donnent du sens à nos existences : la famille, les amis -qui sont dans Héro Corp comme dans Kaamelott une seconde famille-, votre âme sœur : les seules quêtes véritablement épiques dans votre vie. Celles qui feront de vous un héros, un chevalier, ou tout simplement, la meilleure version de vous-même : vous heureux.

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[1]Qui reprend le titre du court-métrage réalisé par Alexandre Astier, avant Kaamelott.

[2]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre I, La coccinelle de Madenn,M6 Vidéo, 28/09/2005

[3]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre V, Jizô, M6 Vidéo, 19/11/2008

[4]Jean Verdon, La femme au Moyen âge, éditions Jean-Paul Gisserot, histoire (coll.), 1999, 2006 (7ème réed.)

[5]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre V, Le phare, M6 Vidéo, 19/11/2008

[6]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre VI, Dies Irae, M6 Vidéo, 25/11/2009

[7]Anne Berthelot (dir.), La légende du roi Arhtur, Éditions du Chêne, Hachette Livres, 2004

[8]Jean Verdon, La femme au Moyen âge, éditions Jean-Paul Gisserot, histoire (coll.), 1999, 2006 (7ème réed.)

[9]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre V, Le phare, M6 Vidéo, 19/11/2008

[10]Alexandre Astier, Jean-Christophe Humbert (real.), Que ma joie demeure !, Universal pictures, 6/11/2012

[11]Alexandre Astier (real.), David et Madame Hensen, Pathé films, 16/01/2013

[12]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre II, L’enragé, M6 Vidéo, 14/06/2006

[13]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre VI, Dies Irae, M6 Vidéo, 25/11/2009

[14]Jean Frappier, Autour du Graal, Librairie Droz , coll. Publications romanes et Française, 1977, Genève, p 89-12

[15]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre I, Goustan le Cruel, M6 Vidéo, 28/09/2005

[16]Alexandre Astier (real.), Kaamelott, Livre VI, Dies Irae, M6 Vidéo, 25/11/2009

[17]E.Abry, C.Audic, P.Crouzet, Histoire illustrée de la Littérature française, H.Didier éditeur, 1941

[18]Christophe Chabert (real.), Entretien avec Alexandre Astier, Cinecitta, produit par Jean-Yves Robin,  Cinecitta, Juin 2008

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16 Comments

  1. Mais quel article ! Juste bravo en premier lieu pour ce travail fourni et très précis. J’adore Kaamelott et je regarde d’ailleurs la série aussi pour y voir d’autres sens que le premier abord humoristique … alors merci pour ce magnifique dossier qui m’apporte énormément de petites pistes supplémentaires quant à ma propre réflexion. Je porte ainsi un autre regard encore sur le personnage d’Arthur qui est pour moi justement tout ce mélange tragico-comique, un être qu’on voit peu à peu « sombrer » mais qui garde finalement cette lumière en lui, bien qu’il semble souvent le faire par « habitude » sans toujours y croire pleinement … Quant au sujet de l’amour à lier au Graal je m’étais fait la même réflexion lors de la scène où Arthur est allongé et qu’il voit ses amours passés dont Aconia qui lui parle du graal/alliance.
    Juste petite remarque, Demetra épouse Yvain et non Gauvain qui est le neveu du roi.
    Encore une fois immense bravo et merci.

    • Tsilla AUMIGNY Tsilla AUMIGNY

      Très intéressant et merci d’avoir relevé cette petite coquille 🙂 quelles sont tes pistes de réflexions ? Ça pourrait être très intéressant pour un prochain article ? 😉 Bien à toi et merci pour ce magnifique commentaire ! Tsilla

      • Je n’ai pas d’analyses et idées aussi poussées et définies que ce tu as rédigé ici, mais c’est surtout sur l’aspect « pédagogique » d’Arthur … il a un peu un rôle d’enseignant pour la plus part des personnages, surtout Perceval et Karadoc par exemple. On est presque dans une forme de filiation avec Perceval, qui comme un gamin souhaite juste rendre fier le roi … il le dit notamment dans la scène à la taverne lorsqu’il discute avec la prostituée. D’ailleurs il recherche son amour en fait, comme lorsqu’il est prêt à partir de Kaamelott quand il pense que le roi ne l’aime pas, et qu’à la fin ils échangent un câlin. Arthur prend du temps pour expliquer les choses à Perceval, et quand on sait ce que les parents lui révèlent sur la manière dont ils ont découvert Perceval, on comprend qu’il a un attachement plus particulier avec lui, comme un enfant fragile.
        Arthur a aussi un genre de destin inassumé, imprévu qui lui tombe sur la tête, lui donnant un statut de leader qu’il a du mal à accepter surtout au début (enfin saison 6 à Rome). Du coup il se retrouve avec une charge dont les contraintes deviennent peu à peu trop pesantes je dirais … Cf livre 4 et surtout 5. Dans le livre 5 d’ailleurs c’est là qu’on en voit le summun alors que cela apparaissait par petite touche sur les saisons précédentes, il a ce côté désabusé et en même temps conscience qu’il est ‘la bonne pomme’ des dieux comme il le dit lui-même. L’une des scènes que je préfère par contre, c’est lorsque sous le règne de Karadoc, à la table ronde il énonce tout ce qu’il a fait pour le graal … malgré son côté blasé et déprimé sous jacent, il sait qu’il a construit quelque chose.
        Je pense toute façon qu’il se sent lui-même « d’en bas » avant tout, et certainement c’est ça qui guide son idée de se « battre pour la dignité des faibles » et d’apporter le Graal pour tout le monde, ce qui le différencie de Lancelot qui est purement élitiste. La saison à Rome montre parfaitement cette ascension hors norme et surtout partant du petit « grade » de soldat. Et bien plus puisqu’il a même oublié toute sa vie précédente, ce qui l’empêche d’être « hautain » on va dire. Alors oui parfois il râle des séances de doléances, des conflits paysans … mais au fond son intérêt est justement de mener des actions justes et à la hauteur de chacun. La fin du livre 6 toute façon est la meilleure manière de comprendre aussi ce côté image de son personnage lorsqu’il évoque l’imaginaire du roi Arthur dans la tête des enfants (roi qui ne renonce pas, courageux …) et qu’il souhaite cacher ses entailles.
        Mais plus globalement, il a aussi un coté « éclairé » en comparaison de tous les autres, la peine de mort, la torture, les tournois qui l’ennui … Ce qui fait d’Arthur en genre de mélange assez étonnant et détonnant pour le contexte et par rapport aux autres. Je trouve Arthur extrêmement touchant et attachant. La seule chose que je lui reprocherais c’est la période Mewanoui (à reprocher à Astier du coup haha) qui n’a pas très grand intérêt amoureux à mes yeux mais plutôt pour démontrer la « décadence » … Bizarrement Astier dépeins des histoires d’amour minimaliste sans sentiments exagérés (Aconia et Mewanoui) ce qui me semble pas spécialement convainquant mais c’est personnel.
        Enfin au sujet d’Arthur ce qu’Astier apporte véritablement, c’est justement de donner de l’epaisseur au personnage … des textes que j’ai pu lire sur la légende arthurienne, Arthur n’est jamais vraiment lui-même personnage, ce sont surtout les autres chevaliers de sa cour. Ici il est au centre, il fait des choses concrètes, il a véritablement sa légende inscrite et décrite ! Ce sont du coup les autres autour qui sont « mauvais », lui est bel et bien efficace. Et ça je trouve ça tout simplement brillant et novateur. Astier a su concevoir le personnage comme le moteur mais aussi l’acteur, on n’est pas juste « à la cour d’Arthur » comme dans un décor de fond, mais dans l’évolution et les interactions autour d’Arthur.
        Bon c’est un peu brouillon et mélangé mais c’est quelques petites choses que je ressens en regardant Kaamelott 🙂
        (Désolée s’il y a des fautes)

        • Je n’ai pas encore pris le temps d’écrire quelque chose sur Kaamelott sur mon site, si ce n’est au sujet de la BD. Mais je souhaitais le faire, c’est en projet et surtout le faire un peu plus autour de ces « analyses » plutôt qu’en décrivant simplement la série 🙂

          • Tsilla AUMIGNY Tsilla AUMIGNY

            Je suis complètement d’accord avec toi et je t’invite à lire le prochain article qui porte sur l’homme en noir et qui aborde quelques unes de ces questions…mais c’est vrai que ce serait très intéressant de faire un article sur la relation privilégiée qu’entretiennent Arthur et Perceval. Merci beaucoup pour ce partage.

            • J’ai hâte ! J’adore aussi le contexte autour du personnage, alors je suis pressée de voir ton analyse. J’aime assez la manière dont Astier a choisi de faire intervenir le Big Bad d’Arthur, Meleagant !

  2. […] Mais… je suis frustrée. La série ne s’arrête ni avec le départ de Marco Polo de l’empire Mongol, ni avec sa mort comme nous pouvions logiquement l’attendre. Après, c’est une série biopic. Alors si, comme moi, vous êtes curieux.se de savoir ce qu’il se passe ensuite, vous pouvez toujours lire une biographie précise de Marco Polo. Même si ce ne sera pas du tout pareil, je vous l’accorde, la fin sera la même. Le débat est de savoir si cela vous plaît… Car on est loin de ce genre de séries ou films dont les théories pullulent sur prochaines saisons ou volets, comme nous pouvons le voir avec Kaamelott. […]

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