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Dans cet article, on s’intéresse à l’un des shônen les plus populaires des années 2000, devenu un véritable phénomène. Un manga qui a su passionner toute une génération et qui a largement contribué à diffuser la culture japonaise à travers le monde. Je parle bien sûr de Naruto : le manga de Masashi Kishimoto sur l’univers des ninjas, publié dans le Shônen Jump de 1999 à 2014 !

Vous vous croyez déjà incollable sur Naruto ? Mais avez-vous bien relevé toutes les références à la mythologie japonaise ? Et au théâtre kabuki et bunraku ? C’est l’occasion de tester vos connaissances !

Alors, prêts pour une introduction à la littérature japonaises à travers Naruto ? Petite liste non exhaustive des références culturelles et littéraires présentes dans l’œuvre de Kishimoto…

La mythologie japonaise dans Naruto : les attaques des Uchiha et les kami

Les membres du clan Uchiha : Madara, Obito, Sasuke, Itachi, Shisui... Ils sont reconnaissables à leurs yeux rouges, les sharingan, dont leur viennent leurs pouvoirs.
Source : NARUTO SHIPPUDEN (Animation) © 2002 Masashi Kishimoto / 2007 SHIPPUDEN. Tous droits réservés. Description : Les Uchiha ne se prennent pas pour rien ! Et c’est normal : leurs techniques leur viennent des dieux…

Amaterasu, Susanoo, Tsukuyomi… La plupart des noms des attaques des Uchiha sont en réalité des noms de divinités mythologiques :

  • Amaterasu est la déesse du soleil, l’une des divinités les plus importantes du shintoïsme car c’est d’elle que descendrait tous les empereurs du Japon. Son nom signifie « la lumière du ciel ».
  • Izanagi et Izanami sont les parents d’Amaterasu, Susanoo et Tsukuyomi. Amaterasu serait née de l’œil gauche d’Izanagi, et Tsukuyomi de son œil droit. C’est peut-être pour cela que, dans Naruto, les pouvoirs des Uchiha résident dans leurs yeux…
  • Tsukuyomi est le dieu de la lune et le frère d’Amaterasu.
  • Susanoo est le dieu des tempêtes, frère d’Amaterasu et de Tsukuyomi. Il possède une épée appelée Kusanagi no tsurugi.

Le théâtre dans Naruto : Jiraiya et le kabuki

Jiraiya monté sur une grenouille géante et en train de faire une pause de kabuki.
Source : NARUTO (Animation) © 2002 Masashi Kishimoto. Tous droits réservés. Description : Le Jiraiya de Naruto est maquillé comme un acteur et prend régulièrement des poses inspirées du kabuki !

Les noms Jiraiya, Tsunade et Orochimaru sont issus du conte Jiraiya Goketsu Monogatari (La Légende du Galant Jiraiya), souvent adapté au théâtre kabuki. Le kabuki est un théâtre populaire, avec des histoires souvent comiques et des acteurs maquillés. Il est différent du , le théâtre sérieux aux sujets graves et aux acteurs masqués.

Dans cette légende, Jiraiya et Tsunade sont mariés et affrontent ensemble Orochimaru, un ancien serviteur de Jiraiya qui cherche à le renverser. Comme dans Naruto, Jiraiya maîtrise les grenouilles, Orochimaru les serpents et Tsunade les escargots.

Le théâtre dans Naruto : Sasori et le bunraku

Sasori avec sa marionnette la plus puissante : celle du troisième kazekage.
Source : NARUTO SHIPPUDEN (Animation) © 2002 Masashi Kishimoto / 2007 SHIPPUDEN. Tous droits réservés. Description : Sasori avec la marionette du troisième Kazekage… Le saviez-vous ? Le nom « sasori » signifie « scorpion ». Tout comme « itachi » signifie « belette ». (Pas le nom le plus stylé, je sais…) Mais les prénoms dans Naruto pourront faire l’objet d’un autre article !

Au cours de son combat contre Sakura, Sasori cite Chikamatsu Monzaemon comme étant le premier marionnettiste ninja. Dans la réalité, Chikamatsu est un dramaturge de l’époque d’Edo (XVIIème -XVIIIème siècle), célèbre pour ses drames de ningyô-joruri, ou bunraku : le théâtre de marionnettes japonais.

Qu’est-ce que le bunraku ??

Si le théâtre de marionnettes européen qui est principalement destiné aux enfants, le bunraku est au contraire un genre sérieux. Surnommé « le Shakespeare japonais », Chikamatsu Monzamon est surtout célèbre pour ses drames, qui s’achèvent souvent par un shinjû (double-suicide amoureux). Sa pièce la plus célèbre est Sonezaki shinjû (Double-suicide à Sonezaki).

Source : niponica NO.33 (web-japan.org) © Kurihara Osamu. Tous droits réservés. Description : Au Japon, les marionnettistes sont sur scène et habillés tout de noir. Dans Naruto, la tenue de Kankurô, tout comme la capuche que porte Sasori avant de révéler pour la première fois son visage, sont inspirés de ce costume.

La culture japonaise, les contes et les légendes

Un bol de ramen : il s'agit d'un bouillon aux nouilles, avec un œuf, deux tranches de porc, des algues (nori) et parfois un naruto.
Source : NARUTO (Animation) © 2002 Masashi Kishimoto. Tous droits réservés. Description : Vous voyez la petite rondelle blanche avec une spirale rouge ? C’est ça, un naruto !

Lorsqu’on parle des mangas comme outil de soft power, c’est évidemment à Naruto que l’on pense ! Même si ce n’est souvent qu’à travers des clins d’œil, l’œuvre de Kishimoto est un formidable moyen de faire connaître la culture japonaise, y-compris à l’étranger.

Outre la littérature, le manga évoque aussi les arts martiaux (avec le ninjutsu) et fait de la publicité pour la cuisine japonaise (le fameux râmen, plat préféré de Naruto !). Ou encore présente des jeux de société traditionnels (le shôgi, passe-temps préféré de Shikamaru) et l’art de l’origami (technique de combat de Konan). Même les musiques de l’anime sont en partie réalisées avec des instruments traditionnels, comme le shamisen ou le koto ! Et le mot « naruto » est lui-même lié à la cuisine, puisqu’il désigne un ingrédient du râmen. Naruto met aussi en avant des valeurs traditionnelles comme l’esprit d’équipe, la famille, et l’importance du groupe (village, clan, etc.) par rapport à l’individu.

La réutilisation des contes et légendes

Kishimoto appuie son histoire sur de nombreux contes et légendes. Le nom « Kaguya », par exemple, est une allusion au célèbre conte de la princesse Kaguya, la jeune fille originaire de la lune.

Quant à l’idée du démon-renard scellé en Naruto et capable de le posséder, elle rappelle les légendes japonaises mises par écrit par l’écrivain-voyageur Lafcadio Hearn au XIXème siècle, et dont l’illustrateur Benjamin Lacombe a récemment donné une version illustrée. Le renard était considéré comme un animal surnaturel, capable de prendre une apparence humaine pour s’infiltrer chez les humains ou pour les séduire. Il pouvait aussi s’attacher à une famille et la protéger en portant malheur à ses ennemis. Et, effectivement, un démon-renard pouvait s’emparer de l’esprit d’un humain : cette légende servait notamment à expliquer les cas de folie.

Enfin, l’apparence de Kisame rappelle une autre créature folklorique décrite par Lafcadio Hearn : le samebito, ou homme-requin.

Conclusion : Qui étaient les véritables ninjas ??

Photo de groupe des ninjas du village de Konoha. Sasuke n'est pas là car c'est l'époque où il a déserté...
Source : NARUTO SHIPPUDEN (Animation) © 2002 Masashi Kishimoto / 2007 SHIPPUDEN. Tous droits réservés. Description : Les ninjas de Konoha !

L’univers de Naruto, s’il n’est pas réaliste, exploite habilement la légende des ninjas. (Qui – on le rappelle – ont réellement existé, même si tout ce qu’on raconte sur eux n’est pas vrai !) Ces assassins mercenaires, experts dans les techniques de dissimulation, les pièges et les poisons, vivaient jusqu’au XVIIème siècle dans les régions d’Iga et de Koga. On y trouve encore aujourd’hui le musée des ninjas !

La terreur qu’ils inspiraient a fait dire – entre autres – qu’ils étaient capables de marcher sur l’eau, ou encore que les signes mystérieux qu’ils formaient avec leurs mains étaient des formules pour invoquer des pouvoirs magiques. (On n’en connaît toujours pas la signification aujourd’hui, mais on suppose qu’il s’agissait en réalité soit d’un code secret, soit d’une prière, soit tout simplement d’une technique pour distraire ou impressionner l’ennemi…)

Les ninjas sont massacrés lors de l’unification du Japon au XVIème siècle, car perçus comme une menace pour cette nouvelle unité, mais leur légende perdure jusqu’à aujourd’hui. A l’ère Meiji (XIXème siècle), apparaît notamment le ninja fictif Sarutobi Sasuke, alors héros d’un conte populaire, et dont le nom est repris à plusieurs reprises dans Naruto.

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Umeboshi : prune japonaise séchée et amer

Rédigé par Umeboshi

Rédactrice, Relectrice SEO, Community Manager, enfant prodige, passionnée d’univers gothiques, mangaphile, parle le japonais couramment, a rédigé une thèse de 80 pages sur JoJo’s Bizarre Adventure.


Bibliographie

BOUVARD Julien, Manga politique, politique du manga. Histoire des relations entre un medium populaire et le pouvoir dans le Japon contemporain des années 1960 à nos jours. Sous la direction de Jean-Pierre Giraud, Université Lyon III Jean Moulin, décembre 2010.

CALLICO Vanessa, SHIITAKE, Contes Japonais, Samoreau, Le Héron d’argent, 2020.

CHIKAMATSU Monzaemon, Les Tragédies bourgeoises (t.1), Paris, Publications Orientalistes de France, 1991. Traduction de René Sieffert.

HEARN Lafcadio, LACOMBE Benjamin, Esprits et créatures du Japon, Toulon, Soleil, 2020.

HEARN Lafcadio, LACOMBE Benjamin, Histoires de fantômes du Japon, Toulon, Soleil, 2019.

NAKAMURA Ryôji, CECCATTY René, Mille ans de littérature japonaise -Anthologie du VIIIe au XVIIIe siècle, 1982, Editions Philippe Picquier (revue en 2005).

PINON Matthieu, LEFEBVRE Laurent, Histoire(s) du manga moderne 1952-2012, Paris, Ynnis Editions, 2019-2022.

Comments

7 réponses à “[ANALYSE] Quels éléments de la littérature japonaise ont inspiré Naruto ?”

  1. […] peintures ! Ce touche-à-tout fan de Dragon Ball depuis l’adolescence est passionné par le Japon. J’ai eu la chance de faire sa connaissance l’année dernière, lors de ma […]

  2. […] car, depuis les années 80, ces mangas continuent d’attirer toujours plus de lectrices. Naruto, pour ne citer qu’un exemple, est aussi populaire chez les garçons que chez les filles, […]

  3. […] si vous en avez assez de One Piece ou Naruto, si vous rechercher des mangas avec de vraies héroïnes… Ou alors un manga avec des […]

  4. […] à aucun autre. Contrairement à l’arc précédent, qui renouait plutôt avec les codes du shônen traditionnel, JoJolion se rapproche plutôt des films d’auteurs japonais, avec des thèmes comme la […]

  5. […] Ainsi, si ce passage du manga se déroule apparemment en Europe, il parle évidemment aussi – consciemment ou non – de l’Histoire du Japon. […]

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  7. […] Naruto et Demon Slayer (Ex-aequo. Pourquoi choisir entre ninjas et kenshi […]

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